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4 Juillet 2008

Interview

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- 7 -
Interview

«…Aux arabes d’apprendre le Français »

4 Juillet 2008

Une interview de Francis Zamponi par Paul Coudsi
(Partie 2)


PC : Quels écrivains intellectuels, artistes, penseurs algériens vous ont influencé, marqué, intéressé ?

FZ :
Si l’on classe Albert Camus parmi les auteurs algériens, ce que je fais volontiers, c’est lui que je citerai en premier. Tant pour le choix de ses sujets de roman que pour son écriture. A l’incitation d’un de mes oncles qui l’avait un peu fréquenté à Alger, j’avais osé lui envoyer un devoir de philosophie consacré à sa conception de l’engagement politique. Il m’avait renvoyé mon travail assorti de quelques commentaires. J’ai perdu ce document au cours d’un de mes nombreux déménagements.


Tournage de « bel ordure », film de Jean Marboeuf
De gauche à droite :
Francis Zamponi, son frère Jean Rémy, et Jean Marboeuf
(Photo Gérard Aymé – 1973)



J’avais aussi, avec mon frère Jean-Rémy, rédigé l’adaptation d’une de ses nouvelles dont nous voulions faire un court-métrage. Sa veuve nous en a refusé l’autorisation et je le regrette encore.

Après Camus, vient l’intellectuel et homme politique algérien dont j’ai le plus tenté de comprendre le parcours, le pharmacien sétifien Ferhat Abbas que j’avais rencontré, enfant, et que j’ai revu alors qu’il terminait sa vie en exil à Nice.
Partisan d’une intégration des Algériens à la France puis d’une autonomie progressive de l’Algérie, il a été en butte à une telle incompréhension et à de telles persécutions qu’il s’est rangé du côté du FLN et a rejoint le Gouvernement provisoire de la République algérienne au Caire.


« Ferhat Abbas que j’avais rencontré, enfant, et que j’ai revu alors qu’il terminait sa vie en exil à Nice.»

Sa figure, dérangeante pour les chefs d’état algériens, avait été bannie de l’histoire officielle dans laquelle elle commence seulement à réapparaître. Le seul article que j’ai publié dans la presse algérienne lui est consacré.

PC : Certains de vos héros se mettent à apprendre l’arabe. Sans jamais aller au bout de leur velléité. Vous êtes comme eux ?

Hélas oui. Le fait que les Français d’Algérie n’aient pas tous été bilingues est révélateur de la relation qu’ils entretenaient avec les « Indigènes ». C’était aux arabes d’apprendre le Français, pas l’inverse.
Mon père parlait et écrivait l’arabe classique et dialectal alors que ma mère ne connaissait que quelques mots.
Les cours d’arabe que j’ai suivi à l’école primaire de Sétif étaient une caricature. Il ne m’en est resté qu’une certaine facilité à lire de droite à gauche et la reconnaissance des caractères. Je m’y suis remis alors que je travaillais à Libération mais, faute de pratique, ma connaissance de cette langue est encore plus faible que celle du latin et du Grec ancien sur lesquels j’ai aussi passé bien des heures.


« Une photo qui m'a été transmise par un internaute : la clinique Biancardini, où je suis né, à Constantine. Le batiment était situé à l'époque rue Tracy le Val, aujourd'hui rue Boudehane… » FZ

PC : La littérature et les arts arabes en général ont il une influence précise sur vous ?

FZ :
Si la gastronomie est un art, oui. Je cuisine et je mange très souvent « arabe ». Pour le reste, hormis quelques visites à l’Institut du monde arabe à Paris, je dois avouer mon ignorance.

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PC : Avez-vous gardé des contacts avec des personnes de votre génération qui se trouvaient à l’époque en Algérie ?

FZ :
Mes relations avec les enfants de ma génération étaient essentiellement constituées par les enfants des amis de mes parents. En « métropole », nous nous sommes parfois revus au cours de repas familiaux mais, à la disparition de mes parents les liens se sont distendus.


Fête de Lutte Ouvrière, mai 2006

J’ai vu récemment, pour un problème d’héritage, mon copain Jean Widenlocher avec qui j’avais découvert le ski en Algérie et qui est aujourd’hui notaire à Nice. Son père était avoué à Sétif mais était surtout homme politique socialiste. Il avait été élu député, SFIO je crois, dans la dernière Assemblée nationale à comporter des représentants des départements français d’Algérie. Mon site m’a aussi permis de renouer avec un ami, fils d’un commissaire de police corse, que j’avais perdu de vue depuis des années et qui fait partie d’un mouvement opposé à la réhabilitation de l’OAS.

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PC : Quel rôle joue l’histoire de la Résistance, et notamment celle de Jean Moulin, dans votre univers personnel ?

FZ :
J’ai découvert Jean Moulin en assistant pour le quotidien Lyon Libération à de nombreuses audiences du procès de son tortionnaire Klaus Barbie. J’ai effectué à cette occasion une plongée dans le monde de l’Occupation et je me suis particulièrement intéressé à la manière dont les institutions républicaines ont fonctionné durant cette période.


« Jean Moulin, mémoires d’un homme sans voix », série d’émissions radiophoniques produite par Radio France, pour laquelle Francis Zamponi écrivit le « journal intime » du grand héros de la Résistance.

J’ai fouillé dans les archives que la justice m’avait entre ouvertes et découvert des personnages dont j’ai pensé, bien que n’étant pas encore romancier, qu’ils feraient d’intéressants personnages pour un livre :

- Un avocat, devenu après la guerre une figure de la politique lyonnaise et qui avait rédigé, sans état d’âme, un petit manuel pratique de mise en application des lois antisémites de Vichy.
- Jean-Joseph Boiron, un petit juge de paix contractuel, qui avait accepté, pour obtenir sa titularisation, de devenir un de ces magistrats qui, le visage masqué, condamnaient à mort les résistants. Il a été fusillé à la Libération.
- Francis André, milicien, qui au moment de son exécution a crié « Vive la France ! » et dont je possède la lettre qu’il a écrite avant d’être fusillé.
- Lucien Iltis, alsacien communiste qui avait livré un réseau de résistance car il facilitait l’avance rapide des troupes américaines vers le Nord, ce que Staline de voulait pas...


Photo : Bernard Soulier
A la féria de Nîmes en 2001



A Lyon, j’ai aussi fait la connaissance de Jacques Vergès qui a fait intervenir au cours du procès de Klaus Babie le souvenir des victimes de la colonisation française.
Un article que j’ai plus tard écrit dans Libération au sujet de cet avocat qui avait été celui du FLN m’a d’ailleurs obligé à m’expliquer lors d’une réunion de rédaction du journal sur mon intérêt suspect envers le défenseur d’un officier SS. Ce jour là, je ne suis pas passé loin d’une condamnation pour négationnisme.


Sur le plateau d’« Apostrophe », l’émission de Bernard Pivot sur Antenne 2, 1998


Mon site m’a aussi permis de renouer avec un ami, fils d’un commissaire de police corse…

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